HISTOIRE DES ECHECS


Les échecs en quelques dates :

 

C’est en Inde, au VIe siècle de notre ère, que serait né l’ancêtre du jeu, le Chaturanga, qui se joue alors à quatre et au moyen d’un dé. En l’an 700, notamment à la faveur de la conquête de l’Espagne par les Arabes, les échecs atteignent l’Europe.
Ce jeu compte alors de nombreux adeptes royaux comme Richard Cœur de Lion, Louis X ou Charles VII mais il faut attendre 1275 pour que la religion catholique lève définitivement l’interdit sur sa pratique. 

 

A la fin du XVe siècle, la parution d’un traité sur les échecs relance l’engouement pour le jeu, jusque-là considéré trop lent. Dès lors, les échecs se modifient : le rythme s’accélère et les bases du jeu moderne sont posées. En 1736, le jeune Philidor, du haut de ses dix ans, bat à la cour de Louis XV le champion de l’époque : s’ensuit une véritable folie des échecs Jusque-là réservés à l’aristocratie, ils investissent désormais les cafés et les universités.

Les premiers clubs et quelques professionnels apparaissent. Cinquante ans plus tard, Benjamin Franklin publie outre Atlantique un ouvrage devenu célèbre : The Morals of Chess. En 1824, la bataille que se livrent les clubs d’Edimbourg et de Londres défraie la chronique, et annonce l’arrivée des premières compétitions internationales. En 1886, l’autrichien Wilhelm Steinitz devient ainsi le premier champion du monde d’échecs. Plus de 100 ans plus tard, en 1997, Garry Kasparov s’incline face à l’ordinateur : une nouvelle page est tournée.

 

 

L’ancêtre des wargames :

 

Nés en Inde, les échecs sont l’invention d’un peuple déchiré par les conflits. Cette connotation guerrière lui permettra de se répandre en Occident, alors aussi militarisé que l’Orient. Très vite, on établit un parallèle entre la guerre véritable et celle de l’échiquier.
Pendant le siège de Jérusalem, les Croisés s’entraînent ainsi au jeu. Au XVIIIème siècle, le champion Philidor utilise la stratégie des généraux révolutionnaires en s’appuyant sur une structure de pions solide.
Les échecs étendront leur influence à de très nombreux jeux de guerre, du Go japonais aux jeux vidéo que l’on connaît aujourd’hui, dans lesquels la tactique et les figures guerrières occupent aussi une place de choix.

 

 

La légende du grain de blé :

 

En Inde, c’est un brahmane du nom de Sissa qui aurait inventé le Chaturanga – l’ancêtre du jeu des échecs – afin de soigner l’ennui de son prince.

En guise de récompense, il demanda au souverain de placer un grain de blé sur la première case d’un échiquier, puis de doubler sa mise à chaque nouvelle case jusqu’à la 64ème.

Le prince, incapable de calculer combien de grains cela représenterait, accepta de bon gré.

Mais il ne put jamais payer Sissa : au total, il lui aurait fallu placer 18 446 744 673 709 551 615 grains ; l’équivalent de 5 000 années de récolte.

 

 

 

Les règles et leur évolution :

 

C’est de l’arabe al-shah-mat (le roi est mort) que provient certainement l’expression « échec et mat ». Dès l’origine, le jeu consiste en effet à mettre l’armée adverse en déroute et à abattre son roi.

Les règles des échecs ont connu de nombreuses évolutions au fil des siècles, visant principalement à accélérer le rythme des parties, jugé trop lent. Le changement le plus important intervient à la fin du XVe siècle, lorsque le fou et la reine (future Dame) acquièrent leur pouvoir de déplacements.

Un siècle plus tard, on introduit un déplacement spécial, le « roque », pour compenser la puissance des pièces maîtresses. Suivra la « promotion », qui permet de promouvoir un pion parvenu à l’autre bout de l’échiquier en la pièce voulue.

 

Echecs et sciences cognitives :

 

Il y a plus de 50 ans, le père de l’intelligence artificielle Alan Turing affirmait que toutes les fonctions du cerveau pouvaient se réduire à des fonctions mathématiques.
Jeu de stratégie combinatoire associant mathématiques et réflexion pure, les échecs intéressent aujourd’hui les plus grands spécialistes de l’intelligence artificielle, mais également les chercheurs en neurosciences et en neurologie : ils auraient en effet un impact avéré sur le cerveau humain.
C’est en tout cas ce qu’essayent de démontrer les chercheurs, qui se sont penchés sur le développement des facultés cognitives de l’enfant grâce à la pratique du jeu.

Devenues en l’espace de quinze ans un véritable spectacle médiatique, les parties contre ordinateur doivent leur succès à la défaite retentissante de Garry Kasparov en 1997 contre  Deep Blue, programmé par une équipe d’IBM.


Le 5 décembre 2006, le champion du monde, Vladimir Kramnik,  s’est incliné lui aussi contre une machine, non sans avoir lutté 5 heures durant, en 47 coups.
La fascination des informaticiens pour les échecs n’a rien de surprenant : il y a plus de combinaisons possibles dans le jeu que de particules dans l’univers. De quoi s’occuper les neurones pendant de longues années encore.

 

Echecs et guerre de Troie :

 

Si les échecs peuvent aujourd’hui être datés des alentours du VIe siècle, on leur a longtemps prêté des origines aussi légendaires que fantaisistes. L’une d’entre elles fait appel au héros mythologique de l’Iliade, grand rival d’Ulysse et fils du roi d’Eubée : Palamède.

Ce dernier aurait en effet inventé le jeu pour distraire l’armée grecque comme le siège de la ville de Troie tendait à s’éterniser. Il est aujourd’hui avéré que les Grecs n’avaient à l’époque aucune connaissance du jeu, mais la légende bénéficiera d’une popularité tenace, puisqu’elle donnera naissance, dans la littérature médiévale au chevalier Palamède, dont les armes reprennent le symbole de l’échiquier.

Elle donnera également son nom à la toute première revue échiquéenne.

 

Echecs et Art :

 

Jeu de guerre, divertissement de cour ou symbole de l’amour courtois, les échecs ont  très tôt influencé les artistes. Diderot y fit ainsi allusion dans son Neveu de Rameau, Lewis Caroll dans Through the Looking Glass et Edgar Alan Poe dans ses Histoires grotesques et sérieuses.
Stefan Zweig s’en est inspiré pour son Joueur d’échecs, et Patrick Süskind pour le Combat. Côté musique, le compositeur Arthur Bliss en fit le cœur de son ballet Checkmate.

Citons enfin la célèbrePartie d’échecs immortalisée par le peintre Lucas van Leyden, en 1508. Au cinéma, dès 1927, « le joueur d’échecs » de Raymond Bernard fait son apparition sur les écrans. Depuis, le 7e art s’est régulièrement nourri de cette thématique.
Citons par exemple A la recherche de Bobby Fisher (1993), La Partie d’échecs avec Catherine Deneuve et Pierre Richard (1994), La défence Loujine, avec John Turturro et Emily Watson (2001) ou encore  la Diagonale du fou de Richard Dembo (1984).

 

L’histoire du « Turk » mécanique :

 

L’idée de faire s’affronter l’homme et la machine autour d’un échiquier ne date pas d’hier. A la fin du XVIIIe siècle, elle donne même lieu à un fantastique canular. Un ingénieur prétend avoir inventé un automate capable de jouer.

Surnommé « le Turk » à cause de son turban et de sa grande cape, le mannequin surplombait un coffre d’érable dont les portes ouvertes donnaient à voir un étonnant mélange de roues et d’engrenages : ces dernières s’ébranlaient à chaque mouvement du mannequin. L’automate de Kempelen fit le tour de l’Europe, et a même battu Napoléon.

60 ans plus tard on découvrit la supercherie : la machinerie n’était qu’une illusion masquant un double-fond, d’où un professionnel activait lui-même le mannequin.

 

Pièces et échiquier :

 

Au fil de ses voyages, le jeu a connu de nombreuses mutations. Ainsi l’échiquier connaît-il jusqu’à 124 cases au lieu des 64 de rigueur aujourd’hui, et revêt les formes les plus diverses - comme en témoignent les échiquiers byzantins de forme ronde. Ses couleurs ont aussi évolué : le noir et blanc ne se généralisent qu’à partir du XIIIe siècle, le jeu se pratiquant auparavant sur une table unicolore, voire une grille à même le sol. Les changements les plus spectaculaires concernent les pièces.

Dans le jeu arabo-persan, elles représentent les symboles d’une armée orientale : éléphants, char et autre vizir. Elles ne trouveront leur dénomination définitive qu’au moyen âge – à l’exception de la Dame, qui remplacera la Reine au sortir de la Révolution : sculptées dans le bois ou l’ivoire, elles constituent alors parfois de vrais chefs-d’œuvre. Il faudra attendre 1850 pour qu’Howard Staunton leur donne forme définitive dans le style que l’on connaît aujourd’hui. On parle d’ailleurs de pièces Staunton.

 

Les grandes figures des échecs :

 

Intimement lié à l’évolution de nos sociétés, l’échiquier génère sa propre histoire avec ses grandes figures marquantes. Parmi les noms incontournables, citons le musicien et enfant prodige Philidor (1726-1795), qui s’impose à la cour de Louis XV à l’âge de 10 ans. Ou encore le premier champion du monde de l’histoire des échecs, Wilhelm Steinitz, en 1886.

Au XXe siècle, le géorgien Tigran Petrossian s’inscrira dans les annales grâce à un jeu défensif devenu célèbre, qui lui permet de rester champion du monde de 1963 à 1969. Bobby Fischer, champion du monde de 1972 à 1975,  reste dans les mémoires autant pour avoir remis en cause la suprématie des Soviétiques, que pour ses exigences qui en firent la bête noire des organisateurs de tournois.

Impossible, enfin, de ne pas évoquer ici la figure de Garry Kasparov (né en 1963) : le premier joueur à dépasser les 2 800 points ; le premier joueur champion du monde, aussi, à essuyer une défaite face à l’ordinateur en 1997.

 

URSS et guerre froide :

 

Grande nation échiquéenne dès avant la chute du Tsar Nicolas II, l’URSS exerce dès 1945 une véritable hégémonie sur le monde des échecs.

Voulant faire du jeu le reflet de sa « formation intellectuelle » (les échecs y sont inscrits au programme des écoles publiques), l’Union Soviétique est piquée au vif par la victoire de l’Américain Bobby Fischer en 1972 dans le match de championnat du monde qui l’opposait à Boris Spassky.

Dès lors, les compétitions internationales prennent une valeur politique, qu’elles ne perdront qu’au sortir de la guerre froide.

Aujourd’hui, la Russie demeure en première position dans le classement des meilleurs joueurs publié par la Fédération Internationale des Echecs.

 

Equipe de France :

 

Sport reconnu comme tel depuis août 2000, les échecs se battent aujourd’hui pour faire leur entrée aux Jeux Olympiques après une première démonstration aux jeux de Sydney.

Ils sont déjà reconnus par le Comité international olympique depuis 1999. L’équipe de France masculine, composée aujourd'hui de 7 joueurs (Etienne Bacrot, Joël Lautier, Christian Bauer, Laurent Fressinet, Vladislav Tkachiev, Andreï Sokolov et Maxime Vachier-Lagrave), s’est classée troisième au dernier championnat d’Europe par équipes en 2005.

L’équipe féminine, composée à ce jour d’Almira Skripchenko, Marie Sebag, Sophie Milliet, Silvia Collas, Roza Lallemand et de Maria Leconte, a remporté en 2000 le titre de championne d’Europe.